Un jour, mon ami Leif (Lee Pee Ville) - et oui, encore lui - me dit que le Cirque de Moscou va faire une tournée, mais dans les salles de spectacles. Il me demande si cela m'intéresse, et bien sûr, j'accepte. Je suis sélectionné, et je suis ravi. Je savais que j'allais faire partie des meilleurs artistes du monde. Pendant des mois, je me suis imposé une condition physique pour être au top, car je savais très bien qu'un magicien ne ferait pas le poids face à ces artistes du cirque.
Arrive le jour J, nous nous rencontrons quelques jours avant pour la chorégraphie et la mise en scène. Le rendez-vous est à 9 heures du matin, et le régisseur du spectacle nous fait passer Sandra et moi les derniers, à 3 heures du matin. J'étais comme un fou, j'avais la rage au ventre. Je me suis dit voilà encore la preuve que nous sommes vus comme des pousseurs de boîte. J'ai dit à Sandra de tout donner pour la Malle des Indes et de ne pas ramasser le rideau, mais de le laisser tomber. On s’exécute, et le gars et tous les artistes, qui ont dû rester pour regarder, sont impressionnés sans trop comprendre, car nous étions vraiment trop rapides pour ce monsieur qui n'avait rien à faire de nous. Il me demande de recommencer. Je lance ma blague habituelle : "Un magicien ne refait pas son tour
deux fois !" Et vlan, dans les dents ! Mais nous avons refait le numéro à la même vitesse, et le respect s'installa .
C'est parti pour trois mois de folie, presque tous les deux jours dans une autre ville. C'était complètement fou. Dans chaque ville, je voyais sur les murs des affiches aussi grandes qu'une maison avec ma tête dessus, dans les journaux idem. J'étais souvent en première page, l'effet magicien pirate avait accroché. Dans notre contrat, il était stipulé que nous devions faire deux passages de magie de 12 minutes, aucun souci. Mais la tournée ne se passait pas comme prévu. Nous étions comme des stars dans les meilleurs hôtels et surtout les plus grandes salles. Je pense que les organisateurs ont vu très grand, car souvent les salles n'étaient pas pleines. Il fallait trouver une solution ou c'était la faillite. Bien sûr, cela n'a pas tardé : la première chose à faire, c'était de baisser le salaire des artistes. Chacun passe dans un bureau individuellement et dit oui, sauf le pirate. Problème, le pirate fait sa grosse tête, que faire ? On téléphone à mon agent. Alphonse fait un effort : d'accord, moins de salaire et un numéro de moins, ok, c'est reparti.
La tournée était vraiment très difficile, des milliers de kilomètres avec un chauffeur de bus qui ne dormait pas. Résultat : le bus se plante, mais heureusement, pas de blessés. J'ai pris beaucoup de plaisir à travailler avec ces artistes, et j'étais souvent très impressionné par mes collègues russes qui donnaient tout sur scène et qui faisaient la fête le soir.
Un jour, l'un d'entre eux était tellement ivre qu'il a fait un plongeon dans la piscine. Le hic, c'est qu'il n'y avait pas d'eau. Il s'est ouvert la tête, mais le lendemain, il était sur scène.
Une production de télévision nous a suivis et a réalisé un reportage complet sur nous, c'était vraiment impressionnant.
Un jour, je me retrouve seul dans les gradins et je vois devant mes yeux mon parcours.
Je me demande ce que je vais devenir et qui serait intéressé par mon histoire. Je dis à Sandra que nous devrions faire une pause pour créer une famille. Neuf mois plus tard, ou peut-être onze, je crois, la magie a opéré. Nous avons réalisé notre plus beau tour de magie : « Léa ».
Après cette tournée, vous n'allez pas le croire, on me propose de faire la tournée du Cirque de Pékin. Là, non merci, c'est bon. https://www.alphonse-magicien.fr/spectacle-grande-illusion
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